Les dépassements en F1 sont « presque impossibles »

Les pilotes sont unanimes pour évoquer les difficultés pour doubler avec le nouveau règlement. Nico Hülkenberg juge les dépassements « presque impossibles ».

 

La victoire de Sebastian Vettel à Melbourne, et la perspective d’un duel avec Lewis Hamilton, ont apporté un vent de fraîcheur dont la Formule 1 avait besoin après trois saisons de domination sans partage de Mercedes. Mais le déroulement de la course, avec un manque de spectacle, a fait naitre des inquiétudes.

 

Le constat est sans appel : cinq dépassements, contre 39 pour la même course il y a un an. Les faits de course ont évidemment une influence sur le nombre de dépassements, mais cette situation était attendue depuis de nombreux mois : le nouveau règlement augmente les appuis aérodynamiques, ce qui génère plus de turbulences et rend difficile de suivre une monoplace. Les dépassements deviennent donc plus difficiles.

 

« Quels dépassements ? » a ironisé Felipe Massa après l’arrivée à Melbourne, selon l’Evening Standard. Il a réalisé une course en solitaire à la sixième place. « Pour le pilote c’est fun, mais les dépassements sont vraiment plus difficiles maintenant. » Même constat du côté de Max Verstappen : « C’était dur de suivre une voiture et d’être proche, » explique le Néerlandais.

 

Pendant les essais privés, Lewis Hamilton avait exprimé son inquiétude. Il a en partie perdu le Grand Prix d’Australie en perdant du temps derrière Max Verstappen : « C’est vraiment bien pire, comme je l’avais anticipé, » estime-t-il. « J’espère que ça ne veut pas dire que ça sera une procession le reste de l’année. Je veux être plus proche des voitures, avec plus de bagarres roues contre roues. On fait la course dans les stands maintenant. »

 

Ocon et Hülkenberg ont souffert derrière Alonso

 

L’un des rares dépassements a été celui d’Esteban Ocon sur Fernando Alonso, suivi par celui de Nico Hülkenberg sur l’Espagnol. Les deux hommes ont passé une grande partie de la course derrière Alonso, sans pouvoir le doubler. Et ils ont réussi à prendre l’avantage au moment où il commençait à avoir un souci de suspension.

 

« Nico et moi, nous étions beaucoup plus rapides que Fernando, mais nous ne pouvions pas nous rapprocher donc c’était dur, » a expliqué Ocon à ESPN. « Il a fait une petite erreur au virage 12 et j’ai réussi à me rapprocher pour tenter ma chance. »

 

Un autre changement vient compliquer les dépassements. Les pneus sont désormais plus endurants. Utiliser un type de pneu plus tendre ne permet plus de faire la différence, comme l’a constaté Hülkenberg derrière Ocon : « J’espérais qu’il souffrirait en tendres et j’étais en ultra-tendres, » a expliqué le pilote Renault à ESPN. « Mais j’ai vite compris que ça n’arriverait pas. »

 

Il est inquiet pour l’avenir : « Dans ces voitures, les turbulences sont énormes, donc les dépassements (sont) presque impossibles. J’aurais probablement pu aller plus d’une seconde plus vite (au tour). »

 

Les turbulences se sentent en étant plus loin

 

Comment la différence se fait au volant ? En plus des turbulences supplémentaires, les voitures sont plus sensibles à l’aérodynamique. Alors que l’effet de « déventage » survenait quand un pilote était à 1,0sec ou 1,5sec d’un rival auparavant, il se fait déjà sentir à 2,0sec ou 2,5sec désormais. Sebastian Vettel l’a constaté en début de course à Melbourne. Il semblait plus rapide que Lewis Hamilton mais il n’a jamais pu tenter un dépassement.

 

« C’est vraiment (plus difficile), » a déclaré l’Allemand à ESPN. « Les dernières années, c’était déjà dur de suivre quand on était à 1,0 sec ou 1,5 sec, juste parce que les turbulences perturbent l’aérodynamique de la voiture. Çà veut dire qu’on a moins d’adhérence quand on suit une voiture, et maintenant que l’adhérence se repose plus sur l’aéro, l’effet est plus important. »

 

« Les voitures sont également plus larges donc je pense qu’il y a plus de turbulences, je pense que c’est plus en étant à 2,0sec ou 2,5sec qu’on sent de gros effets provoqués par la voiture de devant, et en courbe c’est plus dur de rester au contact. Evidemment, on a une meilleure aspiration en ligne droite mais si on ne peut pas suivre en courbe, c’est difficile d’avoir l’aspiration, donc c’est ce qui pose problème. »

 

Verstappen fait la même analyse : « Dès qu’on est à moins de deux secondes, on sent vraiment que ça détruit les pneus, » déplore-t-il.

 

Des espoirs existent

 

Face à ce constat, quelle sont les espoirs ? Ils résident peut-être dans les pneus. Leur meilleure endurance leur permet de moins se dégrader derrière une voiture. Si le pilote aura plus de mal à doubler, il pourra peut-être essayer de le faire plus longtemps.

 

« La façon dont les pneus tiennent derrière une autre voiture permettra potentiellement aux pilotes d’attaquer plus parce qu’ils peuvent revenir, » a expliqué Andrew Green, le directeur technique de Force India, au Guardian. « On peut sur conduire avec les pneus, et ils reviennent. C’est totalement différent de l’an dernier. »

 

« C’était toujours difficile pour un pilote quand ils se rapprochaient d’une voiture, s’ils attaquaient et qu’ils ne parvenaient pas (à doubler), ils détruisaient les pneus et (les pneus) ne revenaient pas. Cette année, il semble qu’on peut attaquer, qu’ils reviennent, et attaquer à nouveau, on peut avoir plusieurs chances. Ca pourrait être le mécanique qui déclenche plus de dépassements. Je suis optimiste. »

 

Pour Christian Horner, il faut de toute façon attendre pour avoir une réelle idée de la situation : « Je pense qu’il faut attendre de faire un jugement, deux ou trois courses, » a déclaré le patron de Red Bull à Crash.net. « Si on regarde l’historique de Melbourne, ils y a rarement eu beaucoup de dépassements ici. La Chine est Bahreïn sont deux circuits où c’est beaucoup plus facile de doubler. »